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Evidences et coup dur…

logoboxeLa journée s’est écoulée comme dans un rêve : comme d’habitude, le temps a filé, ne me laissant aucun moment de loisir. C’est dans le métro, en rentrant du Louvre, que j’ai enfin cinq minutes pour repenser à cette étrange rencontre de ce matin : le Simon en question ne s’est pas encore manifesté, mais il faut dire que j’ai quitté la galerie assez tôt en début d’après-midi et que je n’y ai pas remis les pieds. S’il a appelé, je ne le saurai que demain. Tant mieux, je suis assez fatiguée et je n’ai aucune envie de me remettre toute seule la pression. Laissons faire le temps, on verra bien. Après un coup d’œil au trajet qu’il me reste à faire et aux voyageurs qui sont avec moi dans le wagon, j’ouvre mon sac et je prends le bouquin de la Pléiade, histoire de me replonger dans l’atmosphère poétique qui s’exhale de ces pages si légères.. Les mots s’animent et dansent devant mes yeux en fonction des cahots qui secouent le convoi. Décidément j’aime beaucoup ce qu’a écrit Baudelaire, c’est une véritable découverte, moi qui étais plutôt roman policier ou thriller, j’avoue être agréablement surprise…

Les stations se succèdent, il est plus de vingt et une heures lorsque je me retrouve enfin en bas de chez moi : tous les commerces sont fermés, il y a un petit vent frisquet qui remonte la rue en glissant ses doigts froids sous ma jupe, toute la population de la rue des Martyrs se terre à l’abri de ses persiennes soigneusement closes. Le trottoir n’en finit pas de grimper. J’arrive enfin devant la porte de mon immeuble et constate avec étonnement qu’elle est restée entrebâillée, ce qui n’est pas normal. Sans réfléchir davantage, j’entre dans l’immeuble et la referme soigneusement derrière moi. Il me reste le plus difficile, les cinq étages à monter avant de pouvoir enfin me glisser dans mon lit bien douillet… C’est parti, je bloque toutes mes pensées et grimpe sans m’arrêter. C’est lorsque je débouche sur mon palier que je constate un truc bizarre : la lumière qui fonctionnait ce matin semble hors service ce soir et c’est dans une pénombre incertaine que je m’avance vers ma porte. Et là, je m’arrête, horrifiée, mon cœur se mettant à battre à cent à l’heure : cette putain de porte est à moitié ouverte, laissant apercevoir un océan de noirceur dans mon appartement. Je plaque une main sur ma bouche pour m’empêcher de hurler, pétrifiée sur place. Le temps semble ralentir, je ne bouge toujours pas. Puis je me ressaisis, j’essaie de calmer le rythme de ma respiration, de faire le vide en moi pour avancer. Un pas, puis deux. J’ai peur. Je glisse une main entre la porte et le mur à la recherche de l’interrupteur mais je déchante vite : le courant a dû être coupé, le plafonnier refuse de s’allumer. Merde. Que faire ? Quelqu’un est entré chez moi, cela ne fait aucun doute. Je pousse la porte et je recule d’un pas, prête à décamper, mais rien ne se produit, pas même un appel d’air. Que fait-on en principe dans cette situation-là ? Aucune idée. D’une main tremblante, je cherche mon iPhone et l’allume en le tenant tendu face à l’obscurité : la lueur dégagée par l’écran est suffisante pour que je puisse constater les dégâts : mon Dieu ! Tout est en vrac, des livres partout par terre, mélangés à mes fringues, les quelques plantes vertes sont renversées, le contenu de tous les meubles a été sorti et éparpillé sur le sol dans toutes les pièces, même la vaisselle, tout… Mon appartement est un gigantesque capharnaüm, les dernières années de ma vie gisent en tas sur le sol, piétinées, foulées par des pieds inconnus. La rage succède à la peur. Je pose mon sac dans un coin, prête à cogner si jamais le ou les cambrioleurs sont encore là, mais j’ai vite fait le tour, il n’y a plus personne. Je referme la porte, vais au compteur électrique et le remets en marche. L’étendue des dégâts s’affiche alors dans la lumière crue… Je me mets à pleurer et vais m’asseoir sur un coin du canapé : je ne peux pas rester là, pas ce soir, pas avec cette sensation d’avoir été violée au plus profond de mon intimité par des inconnus. Que faire ? Évidemment il faut aller au commissariat porter plainte, faire une déposition, mais là je ne m’en sens pas vraiment le courage. J’attrape une nouvelle fois mon iPhone, pianote sur les touches et lorsqu’on me répond enfin, je mets au moins une minute avant de pouvoir parler de façon cohérente…

Mathilde m’ouvre tout de suite : elle devait m’attendre derrière sa porte. Malgré la situation, je ne peux m’empêcher de sourire : elle est en pyjama et j’avoue que la voir comme ça n’est pas vraiment habituel, elle qui est toujours habillée de façon sexy et provocante ! Elle s’écarte et me laisse entrer : son appartement est situé dans le XIII arrondissement, un quartier populaire très fréquenté et très animé en journée comme en soirée. J’ai récupéré quelques affaires qui trainaient sur mon parquet, les ai fourrées dans un sac et j’ai refermé la porte derrière moi, remettant à demain matin les formalités administratives, le dépôt de plainte et tout le bazar qui va avec.
Merci de m’accueillir, lui dis-je….
– Tu parles, c’est vraiment rien !

Elle s’approche de moi et me prends dans ses bras. je me laisse aller et lui raconte tout, les lèvres dans son cou.. Puis elle s’écarte, se reprend et dit :
Bon, assez parlé ,  je te fais une omelette parce que tu n’as sans doute pas mangé, et après au lit !

Je pensais pouvoir m’endormir mais je me trompais complètement : serrée contre Mathilde, je ne peux m’empêcher de revivre tous les évènements de cette journée : la sensation d’avoir été espionnée cette nuit, le livre ce matin dans ma boîte aux lettres, la rencontre avec ce Simon, le message codé et enfin la mise à sac de mon appartement. La chaleur sous les couvertures agit comme un détonateur sur ma peau brûlante, je me débarrasse de mon vieux teeshirt sur lequel un Cupidon aux couleurs défraîchies tire ses flèches vers une victime consentante et me recouche sur le dos. Mathilde soupire, sa main gauche s’égare sur mon sein, en profite pour en effleurer la pointe. Je ne suis pas encline à partager ma vie avec une fille, mais j’aime faire l’amour pourvu que mon ou ma partenaire soit tendre et attentif, que ce soit une fille ou un garçon. Et puis avec Mathilde, c’est pas pareil, c’est pas la première fois qu’on se pelote toutes les deux. Aussi je ne peux m’empêcher de tressaillir tandis que je sens mon corps réagir, mes cuisses s’ouvrir devant son autre main qui s’aventure sur ma peau… Mais avant que ses lèvres ne se posent sur les miennes et que je ne me laisse emporter par le désir, j’ai tout à coup une fulgurance : comment Simon savait-il que je lisais du Baudelaire ?
Bordel, me dis-je, il ne pouvait pas voir le titre ni le nom de l’auteur de l’endroit où il était…
Je me refais la scène mais j’en suis sûre maintenant, rien ne pouvait lui indiquer le titre ou le nom de l’auteur de mon livre, il ne pouvait pas savoir, sauf s’il est lié de près ou de loin à tout ce qui m’arrive en ce moment… Et pendant que Mathilde s’active entre mes cuisses, je sens monter en moi une rage indescriptible…

La 97 ième récolte des mots a donné ceci : habitude – principe – face – même – population – détonateur – parler – flèche – aimer – déposition – oeil – allumer – indiquer – effleurer
Le blog d’Olivia : http://desirdhistoires.wordpress.com/2013/04/02/liste-des-mots-75/